Myriam fait partie des Multirécidivistes chez les stagiaires du Belem. C’est aussi une fidèle bénévole de la Fondation qui n’hésite pas à donner de son temps pour nous aider sur les escales ou pendant le salon nautique de Paris. Derrière tout ça, se cache un grand amour de Myriam pour le Belem.
Aujourd’hui, c’est avec grand plaisir que nous lui donnons la parole pour témoigner de ses derniers stages à Bord du Belem entre Lorient et Saint-Brieuc puis Saint-Brieuc et Saint-Malo en mai dernier, en voici la première partie.
« Nous sommes déjà mi-mai. Je commence à trouver le temps long depuis le tour de Corse l'été dernier. Besoin de mer, une navigation printanière à bord du Belem s'impose à moi comme une évidence.
Me revoilà donc à nouveau à bord ! Neuf ans que nous ne nous quittons plus : 19 embarquements – le 30ème stage sera inscrit au compteur en débarquant ! Comment décrire en quelques mots ma relation au Belem ? Un vrai coup de foudre, pire encore un feu de Saint-Elme ! En tout cas c'est certain, c'est une rencontre qui a changé ma vie avec désormais une recherche permanente de rejoindre des horizons plus maritimes dès que le temps libre me le permet. Certains appellent cela le virus nautique. A bord, l’amusant qualificatif qui nous revient (car nous sommes nombreux – je suis loin d’être un cas isolé) est «multirécidiviste».
Pour ce retour, j’ai choisi un terrain de jeu bien connu du Belem : le contournement de la Bretagne depuis Lorient jusqu’à la Cité Corsaire Malouine (8 jours de navigation - 2 stages consécutifs avec une journée à terre à Saint-Brieuc). Certes, je connais bien le parcours pour l’avoir déjà fait maintes fois effectué Sud-Nord, Nord-Sud, mais comment dire ? La Bretagne, le Belem, … la Bretagne en Belem, c'est plus fort que moi, je ne m’en lasse pas !
Les quais de Lorient n’ont pourtant ce jour-là rien de très attrayant … Le Trois-mâts se retrouve prisonnier dans le port de commerce entre des cargos céréaliers et d'immenses grues de chargement : l'image d'un frêle insecte à la merci de grands échassiers de ferraille me traverse l'esprit. Ajoutée au tableau, une odeur nauséabonde de soja fermenté qui plombe bien l’atmosphère. Autant dire que les stagiaires arrivés à bon port ne s’égarent pas longtemps sur le pont. 22 heures, après un briefing d’arrivée délivré par Thomas le Second Capitaine, chacun prend ses quartiers en batterie, fait connaissance avec les lieux, s’enquièrent des instructions affichées en coursives. Douce effervescence des premiers instants.
Je m’amuse à rassurer les plus inquiets qui tentent de déchiffrer les feuilles de service avec trop d’empressement. Certains me pose une multitude de questions auxquelles je réponds avec dérision pour apaiser les petites craintes tantôt sur le mal de mer, tantôt sur le manque d’expérience, ou les capacités physiques attendues … Pour une première fois, les appréhensions sont légitimes.
La première nuit sera courte pour la plupart, laissant place à la fébrilité du «vrai» départ … le moment précis où le pilote quitte le navire, nous laissant seuls à l’épreuve des éléments avec l’unique certitude que dans 5 jours nous seront à quai à Saint-Brieuc, ... mais entre les deux, nous nous en remettons aux bons soins de Neptune.
Si le stagiaire est très vite mis à contribution dès l’appareillage, l’accent est rapidement mis sur la compréhension des manœuvres. C’est toujours plus facile de s’amuser avec un nouveau jouet lorsque l’on a la notice en main - cqfd. Sans compter que 1.200 m2 de toile demande une bonne cohésion de groupes et une écoute des plus attentives des ordres dispersés sur 50 mètres de pont.
Prendre la barre est un moment d’exception ! Le Bosco rassure les non-initiés non sans humour : «Tu verras ce n’est pas compliqué. Tu dois juste garder l'alignement des trois mâts. Mets le cap sur le mât de Misaine ! ».
Évidemment, le stagiaire n’aura pas la prétention de maîtriser en quelques jours le maniement d’un trois-mâts barque là où un nouveau matelot gabier mettra entre un mois et un mois et demi pour être vraiment aguerri. On ne s'improvise pas marin. C'est un vrai métier !
A ce sujet, l’équipage du Belem est composé de marins professionnels de la Marine Marchande qui savent partager leurs connaissances avec beaucoup de pédagogie et transmettre la passion qui les anime pour cette incroyable cathédrale de toile au passé historique des plus tourmentés. On dit le Belem sous l’influence d’une bonne étoile, mais lorsque le Commandant vous déroule le puzzle historique qui à ce jour continue encore de trouver ses pièces manquantes, vous serez intimement convaincu qu'une seule et même petite étoile, si vaillante soit-elle, ne peut pas porter toute la responsabilité du bateau à elle seule et que c’est surement la Voie Lactée tout entière qui veille sur ce navire de 116 ans ! » ….
Myriam Villert
Retrouvez la semaine prochaine la suite du récit de notre stagiaire.