José Tenreiro, maître d’équipage à bord du Belem, vient de quitter ce monde, emporté par la maladie.
Né le 2 août 1968 à Royan, il embarque pour la première fois à bord du Belem comme gabier instructeur en mars 2000. Il est titularisé par la fondation Belem en 2005. Il est promu maître d’équipage en juillet 2006, une fonction qu’il honore jusqu’en mars 2016. José Tenreiro cumule un temps d’embarquement record à bord du Belem de 2.382 jours, soit six années et demie de sa vie passées à bord du trois-mâts. Nombreux sont ceux qui ont tenu à honorer sa mémoire et lui rendre hommage en texte et en images.
Les anciens capitaines et seconds capitaines garderont un souvenir impérissable de José…
Marc Cornil, capitaine du Belem de 1990 à 2003. « José Tenreiro, un personnage….et j’aime les personnages ! Je me souviens de son premier jour de travail à bord, nous repeignions les batayoles sur le gaillard en utilisant un « bouchon norvégien » et vu son rythme de travail et la technique, j’ai tout de suite été persuadé que nous venions de recruter un professionnel….peut être de la graine de bosco. Ce qu’il est devenu ! José était un vrai professionnel et il a toujours répondu présent dans les moments les plus difficiles à la mer où en arrêt technique en mettant au service du navire toute son énergie et sa connaissance du métier ! C’était un marin et sous son aspect un peu rude pouvant quelquefois surprendre, il y avait un grand cœur ; dans la confidence, il m’a parlé de sa famille, de sa maman, lorsque sa famille est venue en France, des difficultés et des joies…. A un moment pénible de sa vie où il a dû s’éloigner du Belem, je suis allé lui rendre visite chaque week-end et je n’ai pas hésité à mettre en avant ses qualités réelles pour qu’il revienne vers le Belem qui était dans son cœur ! A son retour, il m’a remercié chaleureusement…José avait véritablement un grand cœur. Au Brésil, lors d’une escale dans une petite localité perdue dans la forêt Amazonienne, lors d’une rare ballade à terre en solitaire, j’ai rencontré José se désaltérant dans un bar, j’ai eu l’audace de me joindre à lui et nous avons beaucoup discuté. Je lui ai dit mon bonheur d’être avec lui, loin des mondanités… Depuis ma retraite, chaque nouvel an, nous entrions en contact….dommage que j’ai raté une rencontre avec lui à Rochefort il y a peu… J’espère que maintenant son esprit vogue sereinement dans l’alizé éternel, je n’oublierais jamais ce matelot, devenu bosco, que j’ai apprécié, estimé, pour le fait simple mais combien noble de n’être qu’un marin ! »
Commandant Jean Alain Morzadec, capitaine du Belem de 2005 à 2015. « Il vient de nous quitter après 18 ans de navigation sur le Belem, beaucoup de souvenirs avec José qui fut dès 1999 matelot dans le quart où j'officiais comme lieutenant ; un homme sur qui j'ai toujours su que je pouvais compter en cas de "coup dur" , là où le bon sens maritime se révèle, et que l'on soupçonne chez les hommes de valeur. Adieu donc, José, tu aurais eu 49 ans trois jours avant moi, le 5 août prochain... Combien de fois avons-nous plaisanté sur ces quelques jours qui nous séparaient... ton courage n'aura pas suffi cette fois à vaincre la maladie et je regrette sincèrement de ne plus jamais pouvoir te revoir sur le pont de la vieille dame. Mes pensées vont vers toi et ta famille.
Gabriel Lelant Saint-Cast, second capitaine du Belem de 2007 à 2011.
« Toi,
C’est un premier embarquement, il y a 17 ans, à destination des Canaries,
C’est un premier baptême en avril 2000 dans l’eau froide de l’Atlantique,
C’est déjà voir en Dan un dieu vivant,
C’est accepter le jeune étudiant futur officier parmi vous,
C’est une escale à Granville de quart à la coupée avec vous qui rentriez bien émus de votre sortie en Glazik et Jalattes, avec la peur de m’en prendre une,
C’est toi qui ne veut plus boire de rhum, ça rend fou tu me disais, tant pis, à mon premier débarquement j’ai tout bu seul,
C’est toi qui me raconte sans cesse ce voyage au Brésil, ta rencontre avec Boukak
C’est des Gin To avec le grand Xav à Lisbonne,
C’est un commandant qui vient te voir là où tu es seul, lieu improbable pour un marin, mais pourtant quel soutien,
C’est toi et moi à envoyer des vents devant en 2004 au zérac, chef de tiers et lieutenant
C’est toi qui me prend la tête car on n’en fait pas de nuit car c’est interdit dans les consignes et on bombe le torse chacun sur la dunette, bien la seule fois où ça a chauffé,
C’est ta nostalgie du voyage de 2002, toujours,
C’est voir arriver cette nouvelle vague de ceux qui sont aujourd’hui des piliers du bord, et un grand qui a aujourd’hui le cœur bien lourd, qui se sent orphelin de toi,
C’est ton imitation la mâchoire en avant de « on va boire un coup ! »,
C’est ce souvenir impérissable des lasagnes de Jean-Claude, putain ce qu’elles étaient bonnes ces lasagnes Jean-Claude !!!!
C’est me raconter ta fille qui flingue paire de chaussures sur paire de chaussures en vélo, ah la la, elle nous accompagnait souvent dans nos quarts Luna…
C’est notre amour du rugby, et ce quart de final 2007 à La Marine à St Nazaire tous les deux, ils l’avaient fait !
C’est cette branlée qu’on s’est pris aux Bermudes en 2008, le navire n’a jamais craqué autant, on barrait au masque de plongée, et je ne dormais pas, tout habillé, la porte ouverte, prêt,
C’est cette escale à Halifax où Pépé, ta pupuce, nous rejoint,
C’est moi qui te dis d’y croire, que tu auras ta chance, qu’il faudra louvoyer,
C’est enfin ton tour, le Saint Graal,
C’est toi meneur d’hommes,
C’est toi qui forme JB, ton élève,
C’est encore du rugby dans un lieu où nous avons échoué tous les deux,
C’est le plaisir du soleil sur nos visages finalement,
C’est cet amour pour la vie que tu avais,
C’est cet amour pour ta fille et ta femme que tu avais,
On est une famille, il y aura toujours une place au carré pour toi, il y aura toujours ta place dans nos cœurs, la vie est belle, tu viens encore de nous le rappeler… »
Thomas Launay, second capitaine du Belem de 2011 à 2013. « José tu es avec nous quoiqu'il en soit et ce soir, peu importe où chacun de nous se trouve ... à Macao ou la Barbade, Hambourg ou ailleurs, ce soir c'est pas l'accordéon du vieux Jo qui nous fera pleurer ... et toi... tu auras le droit de boire comme les autres !!! Grosses pensées vieux brigand ! »
Les mots de l’équipage à bord, qu’ils l’aient bien, peu, ou pas connu, c’est tout le navire qui est affecté.
Jean-Baptiste Leost, maître d’équipage. « J'vais pas mollir bosco, dans la vie comme à la mer ! Tout comme toi, qu’a pas une fois brassé à culer, même sur la fin... Tu vas me manquer mon pote ! Va en paix.»
Vincent Stervinou, gabier instructeur. « Je m’associe à ceux qui t’ont connu pour saluer ta mémoire et ton esprit, qui semble toujours habiter le navire et son équipage.»
Sylvain Le Bihanic, gabier instructeur. « Un marin restera toujours l’âme d’un navire. Repose en paix.»
Gaël Gesbert, chef cuisinier. « Salut José, repose en paix, merci pour tes conseils et tes anecdotes.»
Sylvain Delamarre, chef mécanicien. « Si la maladie de José fut un véritable calvaire, il a su affronter cette terrible épreuve jusqu’à la fin avec un courage qui force le respect.»
Yann Lainé, gabier instructeur. « À toi Bosco, le bourru qui mettait du cœur à l’ouvrage, ses tripes pour ses matelots. Merci et n’oublies pas de te marrer à mes prochaines conneries.»
Thomas Perrin, gabier instructeur. « Merci José, fier et heureux de t’avoir connu, d’avoir appris du gars qui rend meilleur. Jamais je n’oublie l’homme sous la misaine, le bosco, le bonhomme, le copain qu’on aime. Salut Patron.»
Mathieu Chenoun, gabier instructeur. « Parmi tout ce que tu m’as inculqué, loyauté et persévérance sont deux valeurs chères à mon cœur. Merci José pour ces années partagées et la confiance que tu me témoignais. Bon vent Bosco.»
Enguerrand Berger, gabier instructeur.
« Au revoir Bosco
Tu nous quittes trop tôt.
Avec toi à bonne école je suis passé
Tu as fait de moi un gabier.
Maintenant tu peux naviguer en paix
Et je sais que tu es paré pour cette traversée.
Du vent dans les voiles,
Du rhum dans la cale
Et des femmes en escales !
Bon vent à toi Bosco,
Tu vas manquer à tout le bateau. »
Tanguy Boëdec, second capitaine. « José fût mon premier chef de tiers, en plus d’être le bosco lors de mon premier embarquement. Un personnage haut en couleur. Je me suis dit : « Qu’est-ce que je fous là ? ». Un style bien à lui : Rugueux avec son franc parlé. Il travaillait à l’ancienne, fallait en chier pour lui montrer ton envie d’apprendre et ce n’est qu’à ce moment-là qu’il donnait des conseils avisés. Les souvenirs de franches rigolades sur concours de répliques ou bien les parties de pêches à la Margate mais aussi des discussions houleuses. "Cuet’ment nul Bosco". »
Géraldine Baffour, gabier instructeur. « José, c’est notre légende à tous… La représentation parfaite du marin, dans tout son atypisme, son amour de la mer et de la vie. Il y a une part de lui dans chacun des marins qu’il a formé à bord, des expressions qui ne disparaitront jamais et de l’ardeur au travail. Tous les jours, on a une pensée pour lui et parfois de sacrés fous rires… José t’avais un grand cœur, un sacré humour, et tu m’as remise dans le droit chemin à grand coup de savates quand c’était nécessaire, et je t’en remercie. Tu manques comme bosco, tu manques tout court. Merci pour tout ce que tu m’as appris. Hasta siempre camarade. »
Gaël Hubert, maître charpentier. « Merci Zé pour tous ces moments partagés à bord. Difficile de résumer tout ce que tu m’as apporté et appris en seize ans sur le Belem. Merci pour ton franc parlé, ta loyauté et ton grand cœur. Bon vent sur le Grand Océan. Kenavo.»
Patrice Caherec, maître d’équipage. « Que dire en quelques mots, après seize ans de navigation commune d’un bosco du Belem, qu’il a su laisser son empreinte à bord tant par sa façon de parler et ses expressions qui lui étaient propres, que par sa façon de travailler avec l’équipage comme avec les stagiaires. On n’était pas toujours d’accord, mais à nous deux on se complétait dans un seul but, de faire du Belem ce qu’il est. Pour reprendre une de ses expressions, je dirais : « Ciao ma poule ! ». »
Commandant Gweltaz Thirion, capitaine du Belem. « J’ai parfois eu des coups de gueule avec José, de ceux que l’on peut entendre sans tendre l’oreille. Fort heureusement pour l’un comme pour l’autre, il y a le navire. Le Belem fût la raison de notre rencontre, et nous nous accordions à faire ce qu’il faut pour le navire. Des désaccords il y en a eu, mais il y aura finalement eu plus de blagues et de rigolades. Alors que tu nous sortais un « kenavo les bouzeux » lorsque tu débarquais, aujourd’hui à mon tour de te dire kenavo, Bosco.»
La fondation Belem et la Compagnie Maritime Nantaise également très touchées par la disparition de José.
Paul Le Bihan, Président d'Honneur de la fondation Belem. « Au revoir José, ce foutu crabe qui frappe aveuglément a fini par gagner la partie. C'est totalement injuste, même s'il t'est arrivé de jouer quelque fois avec le feu, c'est le propre d'un aventurier. Je me souviens de notre entretien d'embauche lors d’une escale du Belem à Cagliari. Tu n'avais pas à proprement parler le profil type du gabier, mais une vraie envie d'apprendre et de faire. 10 ans après, tu es toujours là, figure incontournable et emblématique du bord. Reconnu, tu es devenu bosco, alter ego de Patrice, tous deux porteurs, dépositaires et promoteurs d'un savoir-faire rare et précieux en matière de gréements à phares carrés. Ces connaissances, tu t'employais à les transmettre avec pédagogie, patience et exigence. Il fallait que l’élève s’investisse et tant mieux ! Ta gouaille et ton franc-parler nous manquent déjà mais c'est d'abord à ta compagne et à ta famille qu'il reste à affronter ce vide au quotidien. Toutes mes pensées les accompagnent. »
Eric Gavoty, secrétaire général de la fondation Belem de 2000 à 2012. «Derrière une personnalité qui s'affichait comme rugueuse, beaucoup de tendresse pour son bateau et son métier»
Monia Kherroub, collaboratrice fondation Belem. « Hommage à un marin, à un collègue, à un ami…Nous avions la fierté de notre ancienneté, les vieux de la vieille ! C’est ce qui nous rendait complices et fiers de travailler pour ce beau navire que tu aimais tant. Voyage en paix cher José, cher ami.»
Virginie Hinet, collaboratrice fondation Belem. «Ton franc-parler, tes coups de gueules, ton humour de marin…Je ne peux m’empêcher de sourire et rire quand je pense aux bons moments passés ensemble que ce soit à bord ou quand tu répondais à chaque fois présent pour venir nous aider au Salon Nautic, tu vas me manquer mais impossible de t’oublier.»
La Cie Maritime Nantaise. «Matelot-gabier puis chef de tiers pour enfin accéder au poste convoité de maître d’équipage en 2012, José Tenreiro, malgré un parcours personnel heurté, a toujours su montrer le meilleur de lui-même, ses qualités de marin et son savoir-faire, pour finalement emporter l’adhésion des directeurs d’armement successifs de la Cie Maritime Nantaise qui lui ont maintenu leur confiance durant ces 16 années de service à bord du trois-mâts BELEM. »
Enfin, José a croisé la route de milliers de personnes à bord à qui il a enseigné les rudiments de la marine traditionnelle et communiqué sa passion…
Cathy Maury, navigante récidiviste chaque année depuis 2002. « Mon cœur pleure en ce début du mois de mai... Même si nous ne nous croisions qu'une dizaine de jours par an à l'occasion de ma venue à bord du Belem, José faisait bel et bien partie de ma vie...C'est lui qui, il y a quatorze ans, a décidé de me donner un surnom qui ne m'a jamais quitté depuis... C'est lui qui, à force de patience et de persuasion, a réussi à me faire monter dans la mâture à une époque où nous devions grimper sans utiliser de stop-chute... C'est lui qui, à force de ténacité et d'encouragements fortement masqués par des "comment, tu ne sais toujours pas ça depuis le temps ?!", m'a permis de découvrir le fonctionnement de ce trois-mâts qu'il aimait tant... Sous ses grognements et sarcasmes de façade, se cachait un homme "attachiant" mais surtout attachant et attentif au bien-être de tous à bord... Derrière la carapace, il y avait en fait un homme sensible et un papa tellement fier de sa fille. Il n'y avait qu'à voir comment ses yeux brillaient quand il nous parlait d'elle... La vie est injuste... José va manquer à tous ceux qui ont eu la chance de croiser un jour son chemin et jamais plus les navigations à bord du Belem n'auront la même saveur... Mori7.»
Myriam Villert, navigante récidiviste et bénévole depuis mai 2004. « J'ai appris avec une profonde tristesse que José nous avait quitté le 8 mai dernier, par l'intermédiaire de Lionel. Cette terrible nouvelle a bien vite été relayée ensuite par les amis, récidivistes par sms, mails et réseaux sociaux et notamment la page Facebook officielle du Belem. Je repense à nos dernières conversations sur sa maladie lors du récent Nautic, il s'était un peu confié. Il était fataliste mais combatif, combatif pour sa compagne mais surtout pour sa petite Luna, la prunelle de ses yeux. José, tout le monde l'adorait. Sous ses airs bougons (il en jouait pour en faire un personnage), il était d'une extrême gentillesse et d'une grande sensibilité lorsqu'on le connaissait un peu. Je l'ai toujours eu à bord depuis mes premières navigations en 2004 et ce jusqu'en 2015. Il devenait facilement plus familier avec les multirécidivistes et il fallait d'ailleurs être vigilant lors du poste de propreté sinon on finissait moins étanche lorsqu'il rinçait le pont. On avait nos petits surnoms, il avait ses expressions qui nous faisaient éclater de rire que ce soit en manœuvres, lors des repas ou des quarts de nuits. Il était heureux à bord et fier de son métier. La fonction de Bosco ces dernières années lui allait parfaitement. Il nous manquera à tous, il me manquera et le navire peut être fier d'avoir pu compter sur un membre d'équipage avec un tel professionnalisme et une telle passion... Il fera partie des belles personnes dans les pages de l'histoire du Belem. J'aurai une pensée pour lui en août prochain en embarquant à Stornoway... »
Jean-Luc Hervé, navigant récidiviste depuis 1996. « José, tu resteras le complice d’un apprentissage sur le Belem et un merveilleux compagnon d’escale. Mes pensées t’accompagnent sur cette nouvelle mer. »
Les témoignages sur la page Facebook du trois-mâts Belem ont également été très nombreux et nous en remercions chaque auteur.